La période de surchauffe est décidément bel et bien finie pour l’industrie mondiale du fret aérien, tout comme pour le transport maritime conteneurisé. Les derniers chiffres publiés par l’Association du transport aérien internationale (IATA), qui portent sur le mois d’août, indiquent une baisse de la demande de 8,3% par rapport à la même période de 2021. L’érosion est ainsi un peu plus modeste qu’en juillet (-9,7%). En glissement mensuel, les volumes progressent même de 1% en données corrigées des variations saisonnières, profitant d’un léger rebond du commerce mondial et de l’assouplissement des restrictions imposées en Chine dans le cadre de la stratégie Zéro Covid. Mais ces éléments ne sont pas suffisants pour envisager tout à fait sereinement les mois qui viennent.
* FTK : tonnes-kilomètres de fret – Source des données : IATA.
Au mois d’août, seules les compagnies d’Amérique latine et d’Afrique enregistrent une progression par rapport à l’année précédente. Mais avec une part de marché respective de 2,2% et 1,9%, elles pèsent assez peu dans la balance.
Les compagnies aériennes d'Europe et du Moyen-Orient ont été les plus touchées par "les vents contraires" qui touchent actuellement le segment du fret aérien. Ces deux zones sont notamment les plus exposées aux perturbations liées au conflit en Ukraine.
Pour les compagnies asiatiques, la situation s’est plutôt améliorée, grâce à l’assouplissement des restrictions Covid-19 en Chine. Un facteur qui a également permis aux compagnies américaines d’enregistrer une érosion un peu moins forte au mois d’août.
Dans le même temps, la restauration des capacités se poursuit, pour accompagner la reprise dynamique du trafic de passagers. L’offre affiche une croissance de 6,3% en août en glissement annuel. Un chiffre nettement supérieur aux +3,6% de juillet. Cette progression est particulièrement notable pour les compagnies asiatiques (+13,9%). Là encore il faut y voir le contrecoup de l’assouplissement des mesures contre le Covid-19 en Chine.
Globalement, le coefficient de remplissage s’élève à 46,7% contre 54,2% en août 2021. À l’international, il passe de 61,1% à 52,4%.
La base de données Upply incluant des prix spots et des prix contractuels, la sensibilité à la conjoncture immédiate est moindre. Sur la plupart des axes, les taux de fret en glissement annuel restent ainsi considérablement plus élevés qu’en 2021. En revanche, en glissement mensuel, on note une accalmie certaine qui, selon les premières données disponibles, s’est accentuée en septembre.
Source : Upply
Quelques bonnes nouvelles sont apparues au mois d’août pour le transport aérien, à commencer par la stabilisation des prix du pétrole et des niveaux d'inflation qui ont ralenti pour la première fois depuis novembre 2020 dans les pays du G7. La légère augmentation du commerce mondial de marchandise constituait aussi un paramètre positif pour le fret aérien, mais probablement de courte durée, car surtout due à un effet de rattrapage, après les perturbations des flux engendrées par les confinements en Chine.
En effet, dans ses dernières prévisions publiées le 5 octobre, l’Organisation mondiale du commerce se montre très pessimiste. "Le commerce mondial devrait marquer le pas au deuxième semestre de 2022 et rester en demi-teinte en 2023 dans une économie mondiale grevée par de multiples chocs", estime l’OMC. L’année 2022 devrait enregistrer une croissance du volume du commerce mondial des marchandises de 3,5%, légèrement supérieure à la hausse de 3,0% annoncée dans les prévisions publiées en avril. En revanche, pour 2023, l’OMC a considérablement revu à la baisse ses estimations, la prévision de la croissance passant de +3,4% à +1% seulement. D’ores et déjà, l’IATA souligne la diminution des nouvelles commandes à l'exportation sur tous les marchés, à l'exception des États-Unis.
De plus, le fret aérien, qui avait considérablement réduit son différentiel de compétitivité avec le transport maritime en 2021, perd aujourd’hui cet avantage. En effet, les taux spot sur l’Asie-Europe dans le transport maritime conteneurisé chutent rapidement depuis le début de l’été.
Parallèlement, les niveaux de stocks restent élevés dans les entrepôts occidentaux, ce qui limitera la nécessité de recourir au fret aérien pour couvrir des besoins urgents. La traditionnelle saison haute 2022 s’annonce donc plutôt atone, après deux années particulièrement vigoureuses.