Source des données : Banque de France – Étude ACSEL "Situation économique et financière des entreprises de TRM", Septembre 2022.
Le secteur du transport routier de marchandises français, comme l’ensemble de l’économie, a connu un rebond en 2021 avec une croissance de 10% du chiffre d’affaires, après une année 2020 perturbée par la pandémie de Covid-19. Cependant, il n’a pas totalement récupéré le manque à gagner issu de cette crise en termes de revenus, révèle la dernière édition du Panorama économique et financier du transport routier de marchandises, présenté lors du congrès de la FNTR le 22 septembre 2022. Autre point d’alerte souligné par Carine Jupin, directrice régionale de la Banque de France : si 8 entreprises sur 10 ont vu leur chiffre d’affaires augmenter, 15% ont enregistré une baisse en 2020 et en 2021.
En matière de rentabilité, le secteur enregistre également une amélioration. Le taux de marge brute d’exploitation retrouve son niveau d’avant-crise, pour s’établir à 6,4% en 2021. L’an dernier, les entreprises ont donc réussi à répercuter la hausse des prix du gazole, qui s’élevait à environ 15%, a souligné Carine Jupin.
Le taux de résultat courant avant impôts progresse également, en gagnant 0,5 point par rapport à 2020. Mais le niveau de marge reste faible, et 30% des entreprises sont dans le rouge.
Dans un contexte de hausse des coûts, la vigilance est de mise, et ce d’autant plus que la situation économique globale se dégrade. Face aux incertitudes liées notamment aux coûts de l’énergie, la Banque de France a présenté plusieurs scénarios d’évolution de l’économie pour 2023. Le plus optimiste prévoit une croissance de 0,8%, mais le plus pessimiste anticipe une récession de 0,5%. Pour les entreprises de transport, la capacité à répercuter la hausse des coûts sera l’enjeu crucial de l’année prochaine.
Le Comité National Routier a publié le 21 septembre les résultats de son enquête longue distance annuelle[1], qui porte sur l’année 2021[2].
Source des données : CNR, Enquête Longue Distance 2021, Septembre 2022.
Selon cette enquête, le kilométrage annuel moyen pour un véhicule a connu une légère baisse entre 2019 et 2021, tandis que le coefficient de chargement a progressé de 0,4 points. "L’indicateur de production d’un véhicule, produit du kilométrage annuel parcouru et du coefficient de chargement, varie ainsi de - 0,7 % entre 2019 et 2021", indique le CNR, la baisse affectant plus lourdement les petites entreprises de 0 à 19 salariés (-0,4%). Sur le long terme, on constate que l’indicateur moyen d’activité du parc des ensembles articulés longue distance calculé sur la période 2009-2021 reste inférieur de - 7,4 points à son niveau moyen de 2000-2008. "Depuis de nombreuses années, les transporteurs essayent de repositionner leurs activités sur des relations régionales ou sur des marchés domestiques pour trouver des gisements de rentabilité, plus compliqués à obtenir sur très longue distance. Ainsi depuis 2007, la distance moyenne d’une relation diminue régulièrement : - 28,6 % entre 2007 et 2021", précise le CNR.
Autre évolution majeure intéressante sur le long terme : la diminution de la consommation de carburant, même si l’enquête 2021 révèle une légère remontée par rapport à 2019 (30,6 l/100 contre 30,3). Cela s’explique notamment par la progression de la part des véhicules Euro VI, qui, représentent 91,5 % des parcs tracteurs exploités en longue distance en 2021.
(*) L’enquête 2020 a été annulée en raison de la crise covid. (**) Coûts rapportés au kilométrage total parcouru. Source des données : CNR, Enquête Longue Distance 2021, Septembre 2022.
Les résultats de l’enquête 2021 "témoignent d’une inflation inédite en 2021, tant par son ampleur que par sa généralisation", souligne le CNR. Tous les postes de coûts subissent des augmentations, et notamment le carburant, qui pèse lourd dans les dépenses d’exploitation. La hausse la plus spectaculaire revient à l’Adblue (+61,8%), mais ce poste ne représente que 0,4% du coût de revient total d’un véhicule en moyenne.
La reprise brutale de l’économie après la première phase de Covid-19 a engendré une forte inflation des matières premières, des pénuries de composants et une désorganisation des chaînes d’approvisionnement. Ces facteurs ont pesé eu un impact sur les prix des pneumatiques, mais aussi sur le prix et sur la disponibilité des véhicules. En 10 ans, la valeur d’achat d’un tracteur neuf a augmenté de 22,2%.
Les coûts du personnel de conduite sont également orientés à la hausse : + 2,7 % en deux ans pour la rémunération des conducteurs et + 4,4 % pour leurs indemnités annuelles de déplacement. La rémunération mensuelle moyenne d’un conducteur longue distance à plein temps s’élève à 2658 € en 2021. En 10 ans, elle a progressé de + 11,3 %, soit un taux de croissance annuel moyen de + 1,1 %, précise le CNR.
Les tendances inflationnistes se sont confirmées en 2022, en particulier sur le poste carburant. La pression est forte également sur les rémunérations, alors que la pénurie de conducteurs s’aggrave.
[1] Le Comité National Routier réalise tous les ans depuis 2000 une enquête portant sur l’activité longue distance du transport routier de marchandises diverses (lots). L’objectif est d’évaluer les conditions et les coûts d’exploitation des poids lourds. Les données portent uniquement sur les ensembles articulés tracteurs gazole + semi-remorques exploités en longue distance, et non sur l’ensemble du parc des entreprises interrogées. L’enquête 2020 a été annulée en raison de la crise covid.
[2] Pour l’enquête 2021, le CNR a mené des entretiens au 4è trimestre auprès d’un panel de 220 entreprises. Ce panel est constitué d’entreprises françaises qui effectuent, à titre principal, du transport longue distance pour compte d'autrui à partir de leurs propres moyens de production.