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Transport routier : quelles solutions énergétiques pour réduire l’empreinte carbone ?

Rédigé par William Béguerie | 17 mai 2019

Le transport routier va rester un outil majeur dans le déplacement des marchandises en Europe, mais devra d’ici 2030 réduire son empreinte carbone. Il peut compter sur un large éventail de solutions énergétiques, depuis le diesel jusqu’à l’hydrogène.

La Commission européenne a décidé en 2018 de légiférer sur les normes applicables aux émissions de CO2 des poids lourds. Ce texte, qui fixe un objectif contraignant de 30% de réduction des émissions d’ici 2030, est bien parti pour s’imposer. Après avoir fait l’objet d’un compromis informel entre les députés et la présidence roumaine du conseil en février, il a été adopté au Parlement le 18 avril par 474 voix pour, 47 contre et 11 abstentions (--> Consulter le texte adopté).

Le diesel toujours solide

L’augmentation des mouvements de marchandises devrait suivre la croissance du PIB d’ici 2030, et cette progression sera largement absorbée par la route. Le transport routier restera donc un outil majeur et dominant de la politique de mobilité des marchandises. Comment les professionnels vont-ils répondre à cette croissance tout en respectant les exigences européennes ? Nous assistons aujourd’hui à une énième querelle des anciens contre les modernes, avec un éclatement des solutions qui donne un aperçu formidable du mix énergétique à la disposition des transporteurs routiers.

Il y a d’un côté les tenants du diesel qui, chiffres à l’appui, affirment que les motorisations diesel ont accompli des progrès gigantesques en efficacité, en sobriété et en limitation de la pollution.  "Au cours des 15 dernières années, les fabricants de camions et de moteurs ont réussi à pratiquement éliminer les émissions des moteurs diesel. La transition vers le diesel à teneur ultra faible en soufre, combinée aux avancées en matière de combustion, de turbocompression et d’injection à haute pression, en plus de l’ajout de systèmes de pointe de traitement des émissions comme la réduction catalytique sélective (SCR) et les filtres à particules; tout cela a contribué à ce que les moteurs diesel de camions lourds d’aujourd’hui atteignent  des niveaux d’émissions tout près de zéro", indiquait ainsi en 2018 Allen Schaeffer, directeur exécutif du Diesel Technology Forum, lors d’un séminaire organisé par ATC Research.

Du GNV au biocarburant

Toutefois, une frange importante des transporteurs teste d’autres solutions comme les motorisations au gaz (liquide ou compressé). Ce carburant est nettement développé en Italie et peine à s’étendre en France par manque de solution d’avitaillement. Les études sont nombreuses mais il ne semble pas qu’il y ait consensus pour que le GNV fasse apparaître le diesel résolument obsolète. Les mesures en faveur de ce carburant en Allemagne sont peut-être susceptibles de favoriser sa dynamique vis-à-vis de ses investisseurs.

Dans le monde, la part de biocarburants consommés dans les transports est en constante progression. Les taux d’incorporation par continent varient mais c’est l’Amérique latine qui affiche toujours le taux le plus élevé à près de 10 % (en énergie). L’Amérique du Nord puis l’Europe suivent, avec des taux respectifs dépassant 6 % et 4 % (en énergie). À l’heure actuelle, seules la Finlande, la Suède et l’Autriche ont déjà atteint l’objectif 2020 de la directive ENR de la Commission européenne (Directive 2009/28/CE relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables) fixant à 10 % la part d’énergie renouvelable dans le secteur des transports. La France se situe en 4e position (8,9 % d’incorporation).

... en passant par l'électrique et l'hydrogène

Les solutions électriques avec batteries semblent perdre du terrain car peu efficaces en autonomie. Selon Forbes, chaque minute de recharge n’assure qu’un parcours maximum de 5 kms contre plus de 30 kms pour du diesel à la pompe.

La vraie sensation vient des solutions électriques à pile à hydrogène ; elles avancent avec un slogan zéro émission carbone, une promesse d’efficacité (puissance, amplitude et temps de recharge) et un nouveau business model. 

Hyundai prévoit 1600 camions hydrogène pour la Suisse et l’Europe livrés en 2023, avec un temps de charge 7 minutes pour 400 kms d'autonomie  (https://www.actu-transport-logistique.fr/routier/hyundai-prevoit-finalement-1-600-camions-hydrogenes-pour-la-suisse-et-leurope-517674.php)

Lors de son show en Arizona en avril 2019, NIKOLA a présenté 2 versions du camion à hydrogène (l’une pour le marché domestique américain en 2022 et l’autre pour le marché européen en 2023). L’offre commerciale consiste à louer un camion pendant 7 ans, entretien et carburant hydrogène compris. La disruption sera totale car la proposition de valeur sera d’éliminer les risques financiers liés à la volatilité des cours du pétrole, de geler les coûts liés à l’équipement mais s’opposera au système actuel de rémunération du transporteur dans la revente du matériel.

Le coût de production de l’hydrogène semble énorme car très énergivore. Cependant de nouvelles possibilités émergent. Haffner Energy, start-up de la transition énergétique, a développé Hynoca, une technologie de production d’hydrogène renouvelable à partir de biomasse et de déchets organiques et annonce que le prix de l’hydrogène pourrait être équivalent au prix du diesel détaxé dès 2025. 

Un déploiement nécessairement européen

Force est de constater que les ambitions technologiques et industrielles sont en capacité d’aider les ambitions politiques de l’UE pour répondre à l’urgence climatique. Comme chaque fois, la logistique de distribution des carburants sera la clé de leur succès ou de leur échec. Le mouvement sera tellement rapide et les connexions étant internationales, nous pouvons affirmer que leur déploiement devra dépasser le cadre des frontières nationales et sera donc définitivement européen.

 Crédit photo : Anne Kerriou