L’industrie du fret aérien enregistre en février 2024 son troisième mois consécutif de croissance à deux chiffres en glissement annuel, avec une progression de 11,9% et 19,7 milliards de tonnes-kilomètres transportées. En données corrigées des variations saisonnières, le trafic se contracte de 1% en glissement mensuel, mais augmente de 10,9% en glissement annuel.
La croissance du trafic reste cependant inférieure à celle des capacités, ce qui engendre une dégradation du coefficient de remplissage de 0,6 point pour le trafic global et de 1,6 points pour le seul trafic international. L’offre, au mois de février, s’élève à 43,8 milliards de tonnes-kilomètres, en hausse de 13,4% par rapport à février 2023 et de 20,6% par rapport à 2022. En données corrigées des variations saisonnières, elle est stable en glissement mensuel et en croissance de 10,5% en glissement annuel. Sur les routes internationales, l’essentiel de la croissance provient des capacités en soute des avions passagers (+29,5%), alors que l’augmentation des capacités tout cargo se limite à 3,2%.
* FTK : tonnes-kilomètres de fret – Source des données : IATA
En cumul annuel, à fin février, les volumes atteignent 40,5 milliards de tonnes-kilomètres, ce qui correspond à une progression de 15% par rapport à la même période de 2023, indique l’Association du transport aérien international (IATA). Il est vrai que le début de l’année 2023 était particulièrement morose, et que l’on peut donc attribuer une partie de cette performance à un effet de base. Cependant, l’IATA souligne que ce trafic cumulé n’est inférieur que de 0,3% aux records enregistrés début 2022. Par conséquent, on peut parler d’un début d’année très positif pour l’industrie du fret aérien.
Selon l’IATA, la demande croissante de fret aérien est d’abord le reflet d'un trafic international dynamique, notamment porté par l'essor du commerce électronique. Par ailleurs, les perturbations en mer Rouge engendrent ces contraintes sur le transport maritime, ce qui peut favoriser le recours au sea/air, et donc accroître les volumes de fret aérien. L’IATA estime néanmoins qu’il ne s’agit pas du facteur majeur de croissance.
Comme en janvier, la croissance du trafic a profité à toutes les régions. Les routes commerciales Afrique-Asie et Moyen-Orient-Europe se sont illustrées avec des progressions respectives de 42,3 % et 39,3 % en glissement annuel, inférieures cependant aux taux du mois de janvier. Les taux de croissance sur les routes Moyen-Orient-Asie et Europe-Asie ont aussi diminué, mais en restant sur des niveaux très confortables puisque la hausse en glissement annuel s’élève respectivement à 21 % et 14,3 %.
L’IATA souligne par ailleurs la performance du marché intra-européen qui, avec une croissance de 24,5 % en glissement annuel, enregistre son meilleur résultat depuis près de trois ans. "Dans l'ensemble, le mois de février a permis de renouer avec la croissance sur les routes européennes. Plus précisément, les marchés Intra-Europe et Amérique du Nord-Europe sont les deux seules zones qui ont connu une amélioration de leur taux de croissance annuel en février par rapport au mois précédent. L'itinéraire Moyen-Orient-Europe a également connu une croissance en glissement mensuel mais un léger déclin en glissement annuel en raison d'un effet de base prononcé", précise l’IATA. L’axe Amérique du Nord-Europe gagne quant à lui en dynamisme avec une progression de 5,2 % en février, contre 1,9 % en janvier.
Les marchés Intra-Asie et Asie-Amérique du Nord subissent en revanche une érosion de la demande, qui s’est contractée respectivement de 4,1 % et 3,9 % en glissement annuel au mois de février. "Ces deux chiffres représentent des baisses substantielles par rapport au mois précédent", signale l’IATA. Le mois de février a été marqué par les célébrations du Nouvel An lunaire, qui engendrent toujours un ralentissement de l’activité en Asie. Cela se reflète aussi dans les résultats des compagnies de la zone Asie-Pacifique, qui enregistrent une croissance du trafic inférieure à la moyenne avec une progression de +11,2% sur les routes internationales. Seules les compagnies américaines font moins bien, avec une progression qui se limite à +3,2%.
L’offre reste abondante par rapport à la demande. Par conséquent, malgré la croissance à deux chiffres du trafic, les taux de fret aérien sont globalement restés orientés à la baisse au mois de février. Selon l’IATA, le repli des recettes unitaires globales, surcharges comprises, atteint 1,8% en glissement mensuel et 18,3% en glissement annuel.
Les perturbations du transport maritime sur l’axe Asie-Europe, en raison des attaques des rebelles houthis en mer Rouge, semblent néanmoins avoir un impact sur les prix du transport aérien. Selon la base de données Upply, qui reflètent le marché contractuel et spot, les prix ont augmenté de 2,9% en février entre l’Asie et l’Europe en glissement mensuel, alors que les taux ont continué à baisser sur la plupart des autres axes. En glissement annuel, les prix sont encore clairement en déclin.
Source : Upply Freight Index
L’environnement économique général montre des évolutions contrastées. Ainsi, l'indice des directeurs d'achat (PMI) de la production manufacturière s’est encore amélioré en février pour atteindre 51,2, se situant ainsi au-dessus du seuil des 50 qui une expansion. L’indice PMI des nouvelles commandes à l'exportation a également augmenté, mais tout en restant sous le seuil des 50, à 49,4.
La maîtrise de l'inflation est également fragile. L’augmentation des prix à la consommation est tombée à 2,8 % dans l'Union européenne en glissement annuel, tandis qu'elle a augmenté à 2,8 % et 3,2 % au Japon et aux États-Unis respectivement. La Chine, enfin, a enregistré une hausse de l'inflation de 0,7 % en glissement annuel après quatre mois de déflation. Une évolution positive dans un contexte d'inquiétude quant au ralentissement économique du pays.
Globalement, les signaux économiques restent donc assez volatils, et sans commune mesure avec la forte progression constatée dans l’industrie du fret aérien. Celle-ci semble profiter d’un effet conjoncturel avec les nouvelles perturbations des flux maritimes Asie-Europe, mais aussi d’un essor significatif du commerce électronique, en particulier au départ de Chine. Selon un article de Reuters, qui cite le média spécialisé Baixiao.com, le e-commerce transfrontalier chinois absorbe environ un tiers de la capacité mondiale des avions cargos longue distance. La "fast fashion", représentée notamment par les marques Shein et Temu, génèrerait la moitié des expéditions transfrontalières chinoises de commerce électronique.