Le mois de juin a commencé en fanfare, en particulier sur l’axe Asie-Europe. La traditionnelle saison haute semblait intervenir plus tôt que prévu, tandis que les compagnies maritimes dosaient les capacités en pratiquant des blank sailing offensifs. Une situation qui rappelait singulièrement la période post-confinement de la pandémie de Covid.
Logiquement, les taux de fret spots ont fortement augmenté, et sur le marché contractuel, le fret le plus urgent s’est retrouvé sous pression. Les clients devaient accepter des tarifs bien plus élevés pour pouvoir charger. Cependant, en fin de mois, la surchauffe a commencé à se calmer. Certes, les taux de fret restent élevés par rapport à la fin de l’année 2023, mais on constate un plateau. En réalité, les fondamentaux de la reprise de la demande européenne ne sont pas solides. La surchauffe semble davantage liée à un mouvement de panique savamment géré par les compagnies que par une vraie reprise économique. Alors que la crise se prolonge en mer Rouge, les chargeurs commencent en effet à craindre de rencontrer des difficultés d’accès aux capacités et ont donc un peu anticipé l’acheminement des marchandises.
Un facteur est venu accentuer le mouvement : la menace que font peser les Houthis en Mer Rouge a repris de la vigueur en juin, après avoir montré quelques signes de faiblesse le mois précédent. Un marin a été tué dans l’attaque contre le MV Tutor, un vraquier grec qui a finalement coulé.
Cet acte terroriste, largement scénarisé par les Houthis, rappelle s’il en était encore besoin que la mer Rouge est aujourd’hui une zone de guerre navale. La question de la menace houthiste est absolument centrale, car c’est aujourd’hui le seul critère objectif de la remontée des taux de fret.
Une majorité des experts s’accordent à dire que la situation actuelle devrait perdurer. À titre personnel, j’estime pourtant que cette interdiction de passage par la mer Rouge pour la plupart des navires, finalement tolérée depuis plusieurs mois par les grandes puissances économiques, devient de plus en plus inacceptable. Les chefs d’État et de gouvernement du G7, réunis du 13 au 15 juin en Italie, ont "condamné les attaques persistantes" et "réaffirmé le droit des pays de défendre leurs navires, conformément à la résolution 2722 du Conseil de sécurité et au droit international". Les Houthis conservent cependant des moyens de pression considérables puisqu’ils détiennent toujours le Galaxy Leader et son équipage.
Sur l’axe Asie-Europe, les taux spots ont forcément flambé, compte tenu du contexte que nous venons de décrire. Mais l’essentiel des volumes sous contrat a continué à passer par le Cap de Bonne-Espérance dans une fourchette de tarifs (...)