BAROMÈTRE. La situation est restée critique pour les compagnies maritimes en matière d’évolution des taux de fret en novembre, tandis que les tensions géopolitiques ont complexifié les opérations.
Malgré les réserves accumulées durant les deux années post-Covid, l’heure est à la restructuration pour les compagnies maritimes et les grands commissionnaires de transport. Lors de la publication de ses résultats financiers, début novembre, Maersk a ainsi annoncé la suppression de 3 500 postes supplémentaires, ce qui porte à 10 000 le total des postes supprimés dans le groupe danois en 2023.
La situation du transport maritime de conteneurs reflète la morosité de l’économie, qui fait craindre une remontée significative du chômage. Tout se passe comme si l’onde de choc pandémique arrivait maintenant, après le "quoi qu’il en coûte" et la restauration des marges des grands acteurs économiques.
Des taux de fret inquiétants
L’état du marché des taux de fret inquiète, surtout en sortie d’Asie vers l’Europe. Le marché sur-réagit par rapport à une baisse des volumes finalement assez limitée. C’est cela qui a poussé les opérateurs à contracter l’offre à l’extrême en novembre, avec un nombre de blank sailings en hausse pour tenter d’endiguer la spirale tarifaire infernale.
Même MSC, qui est celui qui a le plus gagné de parts de marché en 2023, semble siffler la fin de la partie en positionnant des taux FAK "grand public" sur décembre autour de la barre psychologique des 2000 USD/40’ sur l’Asie-Europe entre ports directs. CMA CGM emboîte le pas avec des communications assez semblables sur des niveaux de taux équivalents.
Attention cependant, aux effets d’annonce. En effet, le marché de décembre est déjà couvert pour 95% des volumes via les acteurs en place à des conditions identiques ou proches de celles de novembre. Restaurer les taux de fret à l’approche de 2024 ne sera pas aisé, mais l’urgence financière est devenue patente pour toutes les entités.
Une menace accrue sur l’accès au canal de Suez
Le 19 novembre, un navire roulier, le Galaxy Leader, a été capturé en Mer Rouge par des rebelles yéménites Houthis. Une attaque de choc, en hélicoptère, dont les auteurs ont publié une vidéo sidérante, scénarisée à la façon d’un jeu vidéo. Cette démonstration est inquiétante, car elle témoigne de l’existence de milices organisées et manifestement bien entraînées, bénéficiant de moyens lourds aéroportés. D’autres attaques ont eu lieu le 3 décembre en Mer Rouge. L’armée américaine a déclaré qu’il y avait de bonnes raisons de penser que ces actes avaient été rendus possible grâce au soutien de l’Iran. Par ailleurs, un navire de CMA CGM ayant des liens capitalistiques avec Israël a été visé dans l’Océan indien.
La dégradation des conditions de sécurité dans cette zone fait peser une menace sur l’accès au canal de Suez. Les marines de guerre étrangères ont positionné plusieurs unités pour contrer d’éventuelles attaques. Cependant, la situation géopolitique inquiète les assureurs et les états-majors des compagnies maritimes. Particulièrement exposée, Zim a ainsi décidé d’abandonner le transit via le canal de Suez au profit de la route du Cap de Bonne-Espérance.
La dégradation du transit via le canal de Panama
Une autre voie de passage importante du commerce mondial est menacée : le canal de Panama. La sécheresse qui oblige les autorités à limiter la navigation devient un phénomène structurel. Les conditions opérationnelles sont très dégradées pour les opérateurs, qui font face à des surcoûts, des délais d’attente importants et des aléas problématiques dans la programmation des passages. En conséquence, certains navires commencent à refaire le grand tour via le Cap Horn (...)