Analyse Transport & Logistique

L’évolution des immatriculations de poids lourds en 2024

05 mars 2025

INFOGRAPHIES. Les immatriculations de véhicules utilitaires moyens et lourds de +3,5 T ont chuté de 6,3% en 2024 dans l’Union européenne. L’Espagne et les Pays-Bas sont les seuls pays du Top 15 où les immatriculations ont connu une augmentation.

1/ Marché européen

  • Recul des immatriculations de véhicules de +3,5 t

Le ralentissement économique est désormais palpable sur le marché des poids lourds. Les immatriculations de véhicules de +3,5 tonnes ont diminué de 6,3% en 2024 par rapport à l’année précédente, s’établissant ainsi à 327 896, selon les données de l’ACEA. La base de comparaison est cependant élevée car en 2023, les immatriculations avaient connu une croissance exceptionnelle de plus de 15%, qui s’expliquait notamment par un effet collatéral du Covid-19. En 2021-2022, les pénuries de matières premières et de semi-conducteurs consécutives à la pandémie avaient perturbé la production de véhicules, décalant considérablement la livraison des commandes passées durant cette période. Désormais, les délais de livraison se sont normalisés. Selon l’enquête annuelle de l’Observatoire du véhicule industriel de BNP Paribas, le délai pour disposer d’un véhicule acquis auprès d’un constructeur est passé de près d’un an en juin 2022 à 87 jours en décembre 2024, retrouvant le niveau d’avant la crise sanitaire. Chez les carrossiers, le délai est passé à 111 jours, contre un pic à 152 jours en décembre 2022. 

Malgré la baisse, le niveau des immatriculations en 2024 reste supérieur à la moyenne constatée sur 5 ans.

Au total, le Top 5 représente 69,4% des immatriculations de l’Union européenne, contre 68,6% en 2023.

  • Un coup de frein plus marqué en Europe de l’Est

La quasi-totalité des marchés européens sont touchés par le mouvement de baisse, à commencer par le duo de tête, la France et l’Allemagne. Toutefois, le plus fort repli revient à la Pologne où les immatriculations plongent de 21%, après avoir déjà connu le plus faible taux de croissance du top 15 européen en 2023. Alors que la Pologne occupait le 3è rang en nombre d’immatriculations en 2023, elle rétrograde en 5è position, devancée par l’Espagne et l’Italie. Ces deux pays enregistrent des performances nettement supérieures à la moyenne européenne, avec une quasi-stagnation pour l’Italie, et surtout un bond de 12% pour l’Espagne, seul pays du Top 15 avec les Pays-Bas à enregistrer une croissance des immatriculations. Le dynamisme de l’économie espagnole a profité aussi au marché du poids lourds.

Le cas de la Pologne est en revanche symptomatique d’un coup de frein sur les investissements en matériel qui concerne plusieurs pavillons d’Europe de l’Est, après une période de forte croissance. C’est le cas notamment de la Lituanie, aujourd’hui 8è pavillon routier européen. La République tchèque et la Hongrie accusent également de fortes baisses dans le nombre d’immatriculations, tandis que le repli se situe sensiblement dans la moyenne européenne en Roumanie. Globalement, les PECO avoisinent les 67 000 immatriculations (hors Bulgarie) en 2024, soit une baisse de près de 20% par rapport à l’année précédente, nettement supérieure à la chute moyenne constatée à l’échelle de l’Union européenne.

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Source des données : ACEA 

  • Une domination toujours écrasante du diesel

En 2023, la part des véhicules diesel dans le total des immatriculations de véhicules de +3,5t est aussi stable qu’écrasante, puisqu’elle représente 95,1% du marché. Le recul du nombre d’immatriculations est un peu moins important sur le segment des véhicules électriques, mais les volumes restent dérisoires, avec un total de 7516 véhicules immatriculés en 2024 (-4,6%). Déjà moteur de la croissance en 2023 avec une hausse de 169,8%, l'Allemagne poursuit sur sa lancée avec 3413 immatriculations de véhicules électriques en 2024, ce qui représente une nouvelle progression de 57,4%. Elle passe ainsi largement devant la France, qui s’était distinguée en 2023 en atteignant le chiffre de 3085 immatriculations, mais retombe à 1313 en 2024, soit une chute de 57,4%. Ces deux pays représentent un peu moins des deux tiers des immatriculations de véhicules électriques de +3,5 tonnes. Les Pays-Bas, qui dépassaient le seuil du millier d’immatriculations en 2023, ont également plongé de de 42,3%. La Suède et le Danemark complètent le top 5 de l’UE, devançant de grands pavillons comme l’Espagne et l’Italie. En résumé, on est encore très loin d’un mouvement massif de décarbonation au profit des véhicules électriques, et la motorisation diesel reste ultra-dominante.

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Source : ACEA

  • Les véhicules de +16 t

Les véhicules de +16 tonnes représentent 82% des immatriculations véhicules de +3,5t en 2024. Le marché totalise 268 952 unités, soit une baisse de 8,5%.

Au sein du Top 5, c’est la Pologne qui perd le plus de terrain avec un recul de 22,8%, suivie par l’Allemagne (-12,7%). Les marchés français et italiens résistent mieux, avec une érosion limitée respectivement à -2,4% et -1,8%. Enfin, l’Espagne se distingue avec une progression très significative (+11,7%).

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Source des données : ACEA

2/ Focus sur le marché français

Selon les données du Comité des constructeurs français d’automobiles (CCFA), les immatriculations de véhicules industriels de +5t sur le marché français ont atteint 48 983 unités en 2024, soit une très légère progression de 0,3%. Le segment des +16t se replie toutefois de 2,3%, à 42 569 immatriculations.

Après deux années de belle croissance, le marché des tracteurs routiers a dégringolé, perdant 10,3% à 25 510 immatriculations. À l’inverse, le marché des porteurs poursuit à la hausse amorcée en 2023. Il progresse de 15 % pour atteindre 23 473 immatriculations.

Par ailleurs, en 2024, le marché des véhicules industriels d’occasion s’est replié de 0,7%, avec un total de 51 126 immatriculations. La morosité du marché pèse sur les prix. Selon l’enquête annuelle menée par l’Observatoire du véhicule industriel de BNP Paribas (OVI) auprès des professionnels, près de 80 % des distributeurs ont dû baisser leurs prix pour les tracteurs, en moyenne de 14%, alors que 20% ont pu les maintenir. Concernant les porteurs, "la moitié des distributeurs a pu maintenir les prix, alors que l’autre moitié les a baissés de 11% en moyenne", précise l’OVI.

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Source des données : CCFA

  • Un nouveau déclin attendu en 2025

Le marché du poids lourds devrait continuer à souffrir en 2025. Le ralentissement économique a conduit à une dégradation des marges des transporteurs routiers, qui disposent donc de marges de manœuvre moindres pour investir dans l’extension ou le renouvellement des flottes. Les dispositifs d’aide à l’acquisition de véhicules électriques pourraient stimuler un peu le marché, mais on l’a vu, cela porte sur des volumes assez faibles. Pour 2025, l’Observatoire du véhicule industriel prévoit une baisse généralisée.

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Source : OVI

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Diplômée de l'École Supérieure de Journalisme de Lille, Anne a exercé l’essentiel de sa carrière dans la presse spécialisée Commerce international & Logistique, avant de rejoindre Upply.
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