Analyse Transport & Logistique

Les compagnies maritimes adaptent leur stratégie à la baisse des taux

13 septembre 2023

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BAROMÈTRE. Face à la baisse des taux de fret dans le transport maritime conteneurisé, MSC continue la course aux parts de marché avec l’appui des grands NVOCC. Ses concurrents privilégient plutôt une stratégie défensive.

Mois après mois, le diagnostic se confirme : la reprise attendue en Chine après l’abandon de la politique zéro-Covid n’est pas au rendez-vous. Le pays souffre de la faiblesse de la demande occidentale, qui pèse sur les carnets de commande, et la consommation intérieure ne permet pas de compenser cette diminution de la demande extérieure. La bulle immobilière est en train d’éclater, et dans un contexte incertain, les ménages chinois préfèrent épargner. Les difficultés de l’économie chinoise ne sont pas une bonne nouvelle pour les compagnies maritimes conteneurisées européennes. MSC a choisi de répondre par une stratégie très offensive, alors que la plupart de ses concurrents privilégient plutôt un positionnement défensif.

Les faits marquants

  • La dégradation des comptes des compagnies maritimes

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© UPPLY - Source des données : publications financières des compagnies maritimes. MSC ne figure pas dans ce tableau car cette compagnie ne publie pas ses comptes.

La chute des taux de fret, constatée depuis l’été 2022, produit logiquement ses effets sur les comptes des compagnies maritimes au premier semestre 2023. Les principaux acteurs européens enregistrent un déclin des revenus compris entre 40 et 45% pour leur activité de transport maritime de conteneurs. Les coûts d’exploitation ont également diminué, mais pas du tout dans les mêmes proportions, ce qui engendre une dégradation forte de l’EBITDA. La contraction des volumes reste modeste, ce qui témoigne d’une baisse importante de la recette à l’unité transportée.

  • La course aux parts de marché de MSC

Dans ce contexte de fragilisation du marché, les compagnies maritimes doivent piloter une équation complexe alliant chiffre d’affaires, Ebitda et parts de marché. Les stratégies de parts de marché nécessitent une habileté certaine car il faut rester très présent sur les corridors Est/Ouest pour assumer sa position de global carrier tout en occupant les niches rémunératrices Nord/Sud et short-sea.

Sacrifier trop de chiffre d’affaires, c’est assécher sa trésorerie et sa capacité de conquête, sur un marché où les prédateurs règnent. MSC qui ne publie pas ses résultats financiers, a clairement opté pour une stratégie très offensive axée sur le chiffre d’affaires. Dans la lutte entre les compagnies maritimes qui ont choisi d’intégrer des activités de commission de transport/logistique et les compagnies fidèles aux NVOCC, le premier round estival donne clairement une longueur d’avance au système traditionnel tripartite compagnie/nvocc/chargeur, et à MSC en particulier.

Les compagnies maritimes qui ont du mal à renoncer à leurs exigences en termes d’Ebitda s’exposent à une perte violente de parts de marché. On voit d’ailleurs que les leaders européens qui publient leurs chiffres ont tous concédé une dépréciation dans des proportions à peu près similaires. En refusant de publier ses résultats financiers, MSC évite de montrer au grand jour la dégradation de ses comptes, mais il est évident que la course actuelle aux parts de marché se paie au prix fort. 

  • Des taux de fret dangereusement bas

Les prix sont dangereusement trop bas sur la majorité des grands trades Est/Ouest, dans les deux sens. En sortie d’Europe vers l’Asie, on atteint des points bas historiques correspondant aux seuils du "better than empty", alors que les compagnies font déjà face à des sur-stocks de conteneurs vides en Chine. Ce double phénomène peut conduire ponctuellement à des interruptions de bookings, faute de rentabilité (...) 

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Expert du transport maritime depuis 25 ans, Jérôme met toute sa connaissance du secteur au profit d'Upply. Capitaine de navire dans l'âme, il est également l'auteur du Lexique anglais-français du transport maritime conteneurisé (Paris : CELSE, 2001).
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