Les professionnels du transport routier redoutent un décrochage de l’activité. Les enquêtes de conjonctures et l’évolution des prix montrent en effet des signaux peu favorables.
1/ Évolution de l’activité
(*) Activité de transport routier intérieur de marchandises réalisée par les véhicules immatriculés en France, compte d’autrui et compte propre confondus. Source des données : ministère des Transports.
Au deuxième trimestre 2024, l’activité de transport routier intérieur de marchandises réalisée par les véhicules immatriculés en France a atteint 41,8 milliards de tonnes-kilomètres, soit une baisse de 0,8% par rapport au trimestre précédent, en données corrigées des variations saisonnières et calendaires. Ce résultat met un terme à trois trimestres de redressement progressif, l’activité affichant toutefois une croissance de 3,1% en glissement annuel au T2 2024.
Le transport routier pour compte d’autrui, qui représente la grande majorité de l’activité, se révèle particulièrement en souffrance. Il recule de 2,7% en glissement trimestre au T2 2024 pour s’établir à 36,6 milliards de tonnes-kilomètres. À l’inverse, le transport pour compte propre progresse de 14,6%, après + 2,2 % au premier trimestre 2024 (données révisées). Il s’octroie ainsi une part de près de 12,5% au deuxième trimestre 2024 alors qu’elle avait été inférieure à 11% lors des trois trimestres précédents, souligne le ministère des Transports dans sa dernière enquête de conjoncture.
2/ Évolution des coûts et des prix
Selon l’enquête de conjoncture du ministère des Transports, le prix de revient du transport longue distance (pour un ensemble articulé jusqu’à 44 tonnes) a diminué de 0,8% au deuxième trimestre, après trois trimestres de hausse. Cette baisse est uniquement due à la diminution de l’indice du gazole professionnel (-3,4%), car tous les autres indices sont soit stables ("frais de déplacement longue distance", "conducteur longue distance") soit en augmentation (jusqu’à + 0,9 % pour les "infrastructures").
La dernière note de conjoncture du Comité national routier, publiée en octobre 2024, confirme ces tendances. "Depuis un an, les coûts du TRM, hors carburant, enregistrent une inflation significative : autour de + 5,5 % en moyenne annuelle pour les poids lourds au gazole comme pour les poids lourds au GNL ou GNC", souligne le CNR. Un constat valable aussi bien pour l’activité longue distance que pour l’activité régionale.
Malgré une demande plus molle, les prix ont plutôt résisté, soutenus vraisemblablement par l’inflation des coûts. Après une correction au mois de janvier, les prix sur le marché contractuel sont restés relativement stables, jusqu’en juillet. Sur le marché spot, l’évolution a été plus fluctuante, avec également un pic en juillet. En revanche, les données provisoires pour le 3è trimestre semble indiquer un décrochage qui pourrait témoigner d’un nouvel affaiblissement de la demande.
Source : Upply Freight Index
Malgré la baisse du prix du carburant, une composante essentielle de la structure de coûts des transporteurs, l’inflation constatée sur les autres postes est souvent difficilement répercutée dans un contexte d’accalmie de la demande. La fragilisation du secteur se reflète notamment dans l’évolution des défaillances d’entreprises de transport routier. Elles sont en augmentation de 39,1% au 3è trimestre 2024 en glissement annuel, après avoir déjà grimpé de 37,2% au premier semestre.
Source des données : Altarès - ©Upply
3/ Perspectives
Source : Enquête mensuelle de conjoncture de l’Insee.
Après avoir atteint un très bas niveau au T4 2023, le climat des affaires dans le transport routier de marchandises s’est progressivement amélioré jusqu’en mai 2024, atteignant 98,4 au T2 2024. L’indice s’est ensuite stabilisé sur un plateau entre juin et août, avant de repartir à la baisse en septembre. Là encore, le mois de septembre marque un décrochage, qui s’est encore accentué en octobre.
Source : Enquête mensuelle de conjoncture de l’Insee. Les résultats sont présentés sous la forme de soldes d’opinion pour les questions à trois modalités "en hausse", "stable" et "en baisse". Un solde d’opinion est la différence entre le pourcentage de réponses "en hausse" et le pourcentage de réponses "en baisse".
Les soldes d’opinion sur l’évolution attendue du chiffre d’affaires et de la demande dans le transport routier de marchandises se sont à nouveau dégradés à la fin de l’été. La demande est d’ailleurs le premier facteur cité par les chefs d’entreprises comme source de limitation du développement de l’activité, bien devant l’offre. Les perspectives en termes d’investissement pour les trois prochains mois ont également fortement décliné, avec un solde d’opinion qui recule de 20,5% en octobre, après avoir déjà affiché un repli de 10,1% en juillet.
Les difficultés de recrutement de personnel roulant sont moins critiques que lors de la reprise post-Covid mais se maintiennent cependant à un niveau significatif : en moyenne depuis le début de l’année, 40% des entreprises jugent le recrutement de personnel roulant difficile.