Analyse Transport & Logistique

Les taux de fret maritime soutenus par une demande de précaution

12 mars 2025

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BAROMÈTRE. Après une correction à la baisse en janvier, les taux de fret maritime se sont plutôt stabilisés en février, la demande étant soutenue par la perspective des droits de douane additionnels aux États-Unis.

Les faits marquants du mois

  • Le canal de Suez, enjeu clé de 2025

À l’occasion de la publication des résultats annuels 2024, Vincent Clerc, CEO de Maersk, s’est montré très prudent sur un retour massif et rapide du trafic via le canal de Suez. Il ne l’écarte pas dans le courant du 2è semestre 2025, mais souligne qu’il s’agit d’une bascule lourde, chère et complexe à gérer. La position de Maersk fait écho à celle de MSC, qui a fait savoir par email à ses clients le 21 janvier qu’elle continuerait à emprunter la route du cap de Bonne-Espérance jusqu’à nouvel avis. CMA CGM a également indiqué dans un communiqué du 25 janvier qu’elle continuerait "pour l'instant à donner la priorité à des itinéraires alternatifs, y compris un recours important au passage par le Cap de Bonne-Espérance".

Pour les compagnies maritimes, les enjeux financiers sont colossaux. Point n’est besoin pour les compagnies de précipiter une guerre commerciale qui frémit déjà.

  • Une demande toujours dynamique

Il est encore trop tôt pour connaître les chiffres de février mais en janvier, le port de Shanghai a battu un record en traitant plus de 5 millions d’EVP. Cela s’explique en partie par une croissance persistance des flux intra-asiatiques. Mais le trafic a surtout été dopé par une forte demande des États-Unis, où les importateurs se sont empressés de passer des commandes avant l’introduction de droits de douane additionnels promise par le nouveau président Donald Trump. Le port de Los Angeles a battu un record historique vieux de 117 ans, en traitant 924 245 EVP (+8,1% en glissement annuel). Le phénomène est encore plus impressionnant pour le port de Long Beach, qui affiche une croissance de 41,4% en glissement annuel, à 952 733 EVP. "Le port de Long Beach a commencé la nouvelle année avec le mois de janvier le plus fort jamais enregistré et le deuxième mois le plus chargé de son histoire, en grande partie grâce aux retailers qui ont fait venir leurs marchandises avant l'entrée en vigueur des droits de douane prévus sur les marchandises en provenance de Chine, du Mexique et du Canada", détaille un communiqué.

  • Accalmie en mer Rouge

Aucune nouvelle attaque n’a été signalée depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu dans la bande de Gaza, même si les rebelles houthis ont indiqué qu’ils continueraient à cibler les navires liés aux intérêts israéliens et menacé de reprendre leurs activités si la trêve entre Israël et le Hamas s’interrompait. La désescalade est donc réelle et palpable en Mer Rouge depuis la libération de l’équipage du Galaxy Leader. Lancée pour protéger les navires contre les attaques des Houthis, l’opération militaire Aspides a néanmoins été prolongée d’un an par le conseil de l’Union européenne, c’est-à-dire jusqu’au 28 février 2026. D’autre part, de nouvelles missions lui ont été assignées. Elle devra "être en mesure de collecter des informations, en plus des données nécessaires pour protéger les navires, sur le trafic d’armes et les flottes fantômes en vue de les partager avec les États membres, la Commission européenne, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime [ONUDC], l’organisation internationale de la police criminelle [INTERPOL], l’Agence de l’UE pour la coopération des services répressifs [EUROPOL] et l’Organisation maritime internationale [OMI]".

  • Feu vert de la FMC pour Premier Alliance

La Commission maritime fédérale américaine a donné son feu vert au lancement des services de Premier Alliance sur les États-Unis, quelques jours seulement avant le début des opérations. Heureusement, les services conjoints de HMM, ONE et Yang Ming étaient déjà formatés.

  • Menace de taxe aux États-Unis sur les navires chinois

Suite à une investigation lancée sous l’administration Biden, qui a conclu à "l’existence d’actes, politiques et pratiques de la Chine visant à dominer les secteurs du transport maritime, de la logistique et de la construction navale", l’administration américaine du Commerce (USTR, United States Trade Representative) vient de proposer des mesures de taxation qui ont fait l’effet d’un coup de tonnerre. Le document prévoit des frais pouvant atteindre 1,5 million de dollars par escale portuaire américaine pour les navires construits en Chine et 500 000 dollars pour un opérateur de navires comptant ne serait-ce qu'un seul navire construit en Chine dans sa flotte, ou en commande auprès d'un chantier naval chinois. Une taxe de 1 million de dollars par escale serait par ailleurs imposée aux exploitants de navires basés en Chine, y compris Cosco. L'USTR tiendra une audience publique sur les mesures proposées le 24 mars 2025, qui incluent également des dispositions pour favoriser le transport de marchandises américaines par des navires américains.

Alors simple effet d’annonce ou vraie menace ? Une chose est sûre, de telles mesures seraient de nature à créer des distorsions de concurrence entre les opérateurs maritimes et à renchérir des coûts de transport. 

Les prix

Les annonces d’augmentations générales des tarifs (GRI, General Rate Increase) fleurissent pour le mois de mars, mais elles ne pourront se concrétiser sur le marché que si l’offre se contracte à nouveau. Or nous sommes en plein lancement de nouveaux services avec des unités plus grosses, dans le cadre du déploiement des nouvelles alliances (...)

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Expert du transport maritime depuis 25 ans, Jérôme met toute sa connaissance du secteur au profit d'Upply. Capitaine de navire dans l'âme, il est également l'auteur du Lexique anglais-français du transport maritime conteneurisé (Paris : CELSE, 2001).
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