BAROMÈTRE. Le trafic mondial de fret aérien a enregistré un trafic total de 23,1 milliards de tonnes-kilomètres en mars 2024, soit une croissance de 10,3% en glissement annuel. Les taux de fret sont orientés à la hausse.
L’industrie mondiale du fret aérien confirme mois après mois son redémarrage, avec un quatrième mois consécutif de croissance à deux chiffres en mars 2024. Une performance attribuée notamment au fort développement de l’e-commerce. Le secteur renoue surtout avec un meilleur équilibre : alors que la croissance des capacités dépassait systématiquement celle du trafic depuis plusieurs mois, la tendance s’inverse.
1/ L’évolution de l’offre et de la demande
- Trafic de mars 2024
Selon les données de l’Association du transport aérien international (IATA), le trafic s’établit à 23,1 milliards de tonnes-kilomètres, ce qui représente une progression de 17,4% en glissement mensuel et de 10,3% en glissement annuel. En données corrigées des variations saisonnières, ces mêmes taux de croissance s’élèvent respectivement à 0,2% et 11,4%.
La progression a été alimentée par les routes internationales, où le trafic affiche une hausse de 11,4% en glissement annuel, "grâce à l'augmentation rapide de la demande dans le secteur du e-commerce", estime l’IATA. Toutes les régions ont profité de cette croissance, dans des proportions plus ou moins importantes.
* FTK : tonnes-kilomètres de fret – Source des données : IATA
- Trafic cumulé T1 2024
En cumul annuel, à fin mars, les volumes transportés s’élèvent à 63,6 milliards de tonnes-kilomètres, soit une augmentation de 13,2 % par rapport au T1 2023 et de 0,6 % par rapport à 2022. "Il est important de noter que, pour la première fois, le trafic du premier trimestre a dépassé de 0,4 % les records atteints au premier trimestre 2021", souligne l’IATA. Cette période de 2021 correspondait à une phase de reprise, après les perturbations engendrées par la pandémie. Là encore, ce sont les bonnes performances de l’international qui tirent la croissance au T1 2024, puisque la progression atteint 14,3% sur ce seul segment.
* FTK : tonnes-kilomètres de fret – Source des données : IATA
- Capacités
Le mois de mars a été marqué par une inversion de tendance : la croissance du trafic a dépassé celle des capacités, ce qui n’était pas arrivé depuis plusieurs mois. L’offre s’est établie à 48,9 milliards de tonnes-kilomètres, en hausse de 7,3% par rapport à 2023. En termes corrigés des variations saisonnières, la capacité globale s'est légèrement contractée de 0,1 % en mars en glissement mensuel, tout en conservant une progression de 7,6 % en glissement annuel.
La croissance de l’offre au mois de mars est principalement due à l’augmentation des capacités en soute des avions passagers, qui a enregistré le 35è mois consécutif de croissance à deux chiffres en mars, avec 20,6 % en glissement annuel, précise l’IATA. En revanche, la capacité tout cargo sur les lignes internationales ne progresse que de 1,2 % en glissement annuel. L'évolution en glissement mensuel nuance toutefois la tendance puisque l’offre tout cargo a progressé de 17,7 % par rapport au mois précédent, contre une augmentation de seulement 8,9 % pour les capacités en soute.
En cumul annuel, l’évolution du trafic global se révèle également supérieure à celle de la demande. Cependant, à l’international, les capacités ont augmenté un peu plus vite que la demande. Cette tendance est poussée par les compagnies asiatiques et africaines, qui présentent encore une croissance de l’offre nettement supérieure à celle de la demande, alors que dans toutes les autres régions, on constate le mouvement inverse.
2/ L’évolution des prix
Conséquence de cet inversement de tendance entre évolution des capacités et évolution des volumes, en mars, l'industrie du transport aérien a enregistré un coefficient de remplissage de 47,3 %, supérieur de 2,2 points à celui du mois précédent et en augmentation de 1,3 point par rapport à mars 2023. "Il s'agit surtout de la deuxième variation annuelle positive en point de pourcentage (ppt) depuis plus de deux ans et demi", souligne l’IATA.
Ce rééquilibrage favorable aux compagnies aériennes conduit à une progression des taux de fret en glissement mensuel sur la majeure partie des axes, comme l’illustrent les résultats issus de notre base de données Upply, qui combinent le marché contractuel et le marché spot. En glissement annuel, les taux de fret restent en repli.
L’augmentation des prix au mois de mars est particulièrement significative sur l’axe Europe/Amérique du nord côte Est et sur l’axe Europe/Asie. Sur le premier, cela s’explique probablement avant tout par le dynamisme de l’économie américaine, car l’accident du port de Baltimore qui perturbe le trafic maritime n’a qu’un impact modéré sur le transport de conteneurs. Sur le second, les perturbations en mer Rouge liées aux attaques des rebelles houthis jouent incontestablement un rôle.
Source : Upply Freight Index
L’évolution des volumes par axe géographique présentée par l’IATA confirme ces dynamiques. Les taux de croissance sur les axes Moyen-Orient/Asie et Europe/Asie se sont respectivement élevés à 19,6% et 17,0% en glissement annuel, le premier perdant 1 ppt par rapport à février tandis que le second gagnant 2,7 ppt. Sur l’intra-Asie, la progression annuelle s’élève en 11,8%, en augmentation de 6,7 points par rapport à février. Par rapport au mois de février, les marchés intra-Asie et Europe-Asie ont été les seuls à connaître une amélioration. En comparaison, la croissance est beaucoup plus modérée sur les routes Asie-Amérique du Nord et Amérique du Nord-Europe, qui ont enregistré une progression respective de 4,7 % et 2,9 % en rythme annuel au mois de mars.
3/ Des perspectives jugées "solides"
L’IATA se montre relativement confiante pour les mois qui viennent, en dépit des incertitudes sur le commerce mondial et sur l’évolution de l’inflation. "Le commerce transfrontalier mondial et la production industrielle continuant d'afficher une tendance modérée à la hausse, 2024 s'annonce comme une année solide pour le fret aérien", estime Willie Walsh, directeur général de l’IATA. Ces deux indicateurs ont augmenté respectivement de 1,2 % et de 1,6 % en février. Et en mars, l'indice des directeurs d'achat (PMI) de la production manufacturière a atteint 51,9, ce qui indique une expansion. En revanche, l'indice PMI des nouvelles commandes à l'exportation reste sous la barre des 50 à 49,5, et donc en territoire de contraction.
L’inflation, enfin, reste un paramètre volatil. Dans l'UE et au Japon, le taux d'inflation est tombé à 2,6 % et 2,7 % respectivement, mais il a augmenté aux États-Unis pour atteindre 3,5 %. Quant à la Chine, elle renoue avec une légère déflation de -0,01 % après une brève période d'inflation de février, ce qui n’est pas un signe positif pour l’économie du pays.
Si l’industrie du fret aérien réussit effectivement un bon premier trimestre, elle reste à la merci d’un contexte économique et géopolitique particulièrement tendu.
